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Mines Maths 1 PSI 2006 -- Corrigé
Ce corrigé est proposé par Céline Chevalier (ENS Cachan) ; il a été relu par
Pierre
Bel (Doctorant en mathématiques) et David Lecomte (Professeur en CPGE).
Ce sujet a failli être passionnant. Il annonce en effet qu'il étudie les
fonctions
hypergéométriques, qui sont un thème classique en mathématiques depuis leur
introduction par Gauss en 1812. Hélas, cette bonne idée est sabotée : l'énoncé
ne dit pas ce
qu'est une fonction hypergéométrique, la vue d'ensemble de la démarche est
laissée
en exercice au candidat, et au final on ne profite pas des résultat acquis pour
montrer
quelques applications. Nous remédierons à ces lacunes au fil du corrigé.
Toutefois, si l'on fait abstraction du folklore « hypergéométrique », nous
avons là
un sujet de concours bien conçu, qui alterne les théorèmes et les calculs, qui
récompense le soin et la maîtrise du programme, sans oublier de proposer des
questions
qui permettent de grappiller des points même si l'on ne comprend rien aux
questions
difficiles. Le jury parle à ce propos d'un sujet demandant « une bonne
compréhension
de techniques permettant de trouver des équivalents, des limites et des
majorations
d'intégrales » et « a été surpris de constater de graves erreurs sur les
premières questions, certainement voisines de nombreux calculs traités en
classe ». L'épreuve se
décompose en trois parties de longueurs comparables et de difficulté croissante
:
· La première partie introduit une fonction K définie par une intégrale
dépendant
d'un paramètre :
Z +
K : z 7
t (1 + t) e -zt dt
0
et deux fonctions auxiliaires (I1 et I2 ) dont le calcul suffit à connaître K.
Après
les vérifications d'usage (intégrabilité, dérivabilité, classe C 1 ), on montre
que
connaître I1 et I2 revient à savoir résoudre un système différentiel (S). En vue
de préparer la deuxième partie, on introduit encore une fonction L dont les
fonctions auxiliaires J1 et J2 vérifient elles aussi (S). La lourdeur des
notations
est le principal obstacle dans cette partie pour qui connaît ses théorèmes.
· La deuxième partie ramène l'étude de (S) à la résolution d'une équation
différentielle du premier ordre (question 14), dont on détermine une condition
initiale (question 13) et la solution générale (question 15). Les questions 8 à
12 ne
servent qu'à préparer cet aboutissement. La question 16 consiste à transposer
sur (S) les résultats de la question 15.
· La troisième partie montre que les fonctions de la première partie peuvent
s'exprimer comme des séries entières hypergéométriques.
Au final, cette épreuve constitue un très bon entraînement aux écrits grâce à sa
démarche progressive et raisonnablement guidée, à son recours aux résultats déjà
obtenus et à son utilisation intensive des théorèmes du cours.
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Indications
Partie I
1 Utiliser les règles d'intégrabilité de t 7- 1/t en 0 et en +.
3 Montrer que I1 et I2 satisfont les hypothèses du théorème de dérivation sous
le
signe intégral.
4 Intégrer K par parties en dérivant t 7- t (1 + t) et en intégrant t 7- e -zt .
5 Rassembler les égalités obtenues aux questions 3 et 4.
6 Dériver deux fois les formules de la question 3 et une fois celles de la
question 4,
puis les combiner.
7 Raisonner comme dans les quatre questions précédentes en prenant garde à ne
pas refaire des calculs inutiles.
Partie II
-1
t
et lui appliquer l'inégalité des accrois8 Considérer la fonction t -
7 1+
z
sements finis.
9 Calculer la différence demandée en effectuant le changement de variable u =
zt.
Majorer ensuite la fonction située sous l'intégrale.
10 Effectuer le changement de variable t = u/z - 1.
11 Raisonner comme à la question 9.
12 Utiliser la question précédente et montrer que la deuxième partie de
l'intégrale
est négligeable devant la première.
13 Appliquer les résultats d'équivalence des questions 9 et 12 aux fonctions
intervenant dans la définition de w.
14 Calculer la dérivée de w et remplacer les expressions obtenues à l'aide des
résultats
des questions 5 et 7.
15 Résoudre l'équation obtenue à la question précédente, et utiliser la
question 13
pour déterminer la constante.
16 Utiliser le théorème donnant la structure des solutions d'un tel système en
fonction
de la valeur du Wronskien.
Partie III
17 Développer (1 + t)-1 à l'aide de la formule du binôme.
18 Calculer la limite de un+1 /un .
19 Développer en série entière la fonction exponentielle et utiliser le
théorème d'intégration terme à terme des séries de fonctions. À l'aide des
rappels du début de
l'énoncé, faire intervenir les coefficients (a, k).
20 Dériver terme à terme la fonction y et ajuster les indices.
21 Évaluer l'équation différentielle en y et déduire les valeurs de a et b du
résultat
de la question 20.
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I. Fonctions hypergéométriques
Une série hypergéométrique est une série dans laquelle le quotient des
coefficients successifs an /an-1 est une fraction rationnelle en n, c'est-à-dire
qu'il existe des polynômes P et Q indépendants de n tels que
n N
an
P(n)
=
an-1
Q(n)
Leur nom provient duPfait que ce sont des généralisations des séries
géométriques, de la forme z n , dans lesquelles les quotients successifs des
coefficients sont égaux à 1, donc constants.
Si la série est convergente, la fonction qui en découle est appelée fonction
hypergéométrique. On montrera à la question 19 que les intégrales définies
dans cette partie sont hypergéométriques (voir aussi la remarque clôturant
le corrigé).
1 Soit z R+ . Notons f la fonction t 7- t-1 (1 + t)-1 e -zt . Elle est continue
(donc intégrable) sur tout segment inclus dans R+ , en tant que produit de
fonctions qui le sont, si et seulement si > 1. Il reste à étudier
l'intégrabilité en +.
Comme z est strictement positif, par croissances comparées, on sait que
t2 f (t) = t+1 (1 + t)-1 e -zt ---- 0
t+
quelles que soient les valeurs de et ; autrement dit, f (t) = o(t-2 ) en +.
Comme t 7- t-2 est intégrable en +, on en déduit qu'il en est de même pour f .
t 7- t-1 (1 + t)-1 e -zt est intégrable sur R+ si et seulement si > 1.
Au vu des résultats à suivre dans le problème, et surtout de l'hypothèse qui
suit
la question 2, il paraît légitime de penser que l'énoncé comporte une erreur
dans cette
question : déterminons à présent des conditions nécessaires et suffisantes sur
et
pour que la fonction f soit intégrable sur R+ plutôt que sur R+ .
Une fois que l'on a repéré l'erreur d'énoncé, il peut sembler étonnant de
procéder ainsi, en répondant d'abord à la question posée, puis à la question que
l'on considère exacte. Si l'erreur de l'énoncé rendait la question impossible,
on ne répondrait alors pas à la question posée, mais directement à la question
corrigée. Ici, la question posée est inutile pour la suite mais faisable,
et même facile, donc on la traite avant de répondre (en donnant ses raisons)
à la question que l'on suppose être correcte.
La fonction f est continue (donc intégrable) sur tout segment inclus dans R+ ,
en tant que produit de fonctions qui le sont. Il reste à étudier
l'intégrabilité en 0
et en +.
· En 0 : on a f (t) t-1 , donc f est intégrable si et seulement si - 1 > -1,
c'est-à-dire > 0.
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· En + : z étant strictement positif, on en déduit par croissances comparées
que f (t) = o(t-2 ) quelles que soient les valeurs de et de . Par suite,
la fonction f est intégrable.
t 7- t-1 (1 + t)-1 e -zt est intégrable sur R+ si et seulement si > 0.
Rappelons un résultat classique et fort utile d'intégrabilité (comparaison avec
les intégrales de Riemann) :
· Si b R, la fonction t 7- 1/(b - t) est intégrable en b si et seulement
si < 1. · La fonction t 7- 1/t est intégrable en + si et seulement si > 1.
2 Soit z R+ . Notons g la fonction t 7- (-t)-1 (1 + t)-1 e -zt . Elle est
continue
(donc intégrable) sur tout segment strictement inclus dans ] -1 ; 0 [, comme
produit
de fonctions qui le sont. Il reste à montrer l'intégrabilité en -1 et en 0.
· En -1 : on a l'équivalent g(t) (1 + t)-1 e z , donc g est intégrable si et
seulement si - 1 > -1, c'est-à-dire > 0.
· En 0 : on a g(t) (-t)-1 , donc g est intégrable si et seulement si - 1 > -1,
c'est-à-dire > 0.
t 7- (-t)-1 (1 + t)-1 e -zt est intégrable sur [ -1 ; 0 ]
si et seulement si > 0 et > 0.
3 Intéressons-nous d'abord à I1 . Soit A un réel strictement positif. On
définit la
fonction de deux variables
g : [ A ; + [ × ] 0 ; + [ - R+
(z, t) 7- t-1 (1 + t) e -zt
Elle est de classe C 1 en sa première variable et on a
Par suite,
z > A t > 0
g
(z, t) = -t (1 + t) e -zt
z
z > A t > 0
g
(z, t) 6 t (1 + t) e -At
z
Le membre de droite est une fonction de t uniquement, intégrable sur R+ d'après
la
question 1 puisque + 1 > 0 et + 1 > 0. On a également
z > A t > 0
g(z, t) 6 t-1 (1 + t) e -At
À nouveau, le membre de droite est une fonction de t, intégrable d'après la
question 1
puisque > 0 et + 1 > 0. On peut donc appliquer le théorème de dérivation sous
le signe intégral : I1 est bien définie et de classe C 1 sur [ A ; + [. De plus,
Z +
Z +
g
z > A
I1 (z) =
(z, t) dt = -
t (1 + t) e -zt dt = -K(z)
z
0
0
Le théorème de dérivation fournit à moindre coût l'existence de K.