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Pré-sujet de probabilités des Mines 2014 -- Corrigé
Ce corrigé est proposé par Walter Appel (Professeur en CPGE) ; il a été relu par
Sophie Rainero (Professeur en CPGE) et Céline Chevalier (Enseignant-chercheur à
l'université).
Voici le sujet que le concours des Mines propose comme « sujet 0 », et qui donne
une idée du ton des futures épreuves traitant de probabilités.
Le problème porte sur la modélisation d'une queue de clients, lorsque le nombre
de clients arrivant à chaque instant n suit une loi fixée. À l'aide de la
fonction
caractéristique, on établit notamment une loi « limite » pour le nombre de
clients
restant à servir.
· La première partie fait démontrer quelques généralités sur la fonction
caractéristique d'une variable aléatoire à valeurs dans N. Les propriétés
prouvées
sont des grands classiques de la théorie des probabilités qui, si elles
n'apparaissent pas dans le programme, seront très probablement réintroduites
dans
de nombreuses épreuves.
On montre notamment que la fonction caractéristique caractérise la loi : deux
variables aléatoires (à valeurs dans N, ici) ont même loi si et seulement si
elles
ont même fonction caractéristique.
· Dans la deuxième partie, on montre quelques propriétés utiles sur les
variables
aléatoires An (nombre de clients arrivant entre l'instant n et l'instant n + 1),
censées toutes suivre la même loi qu'une variable A, et sur les variables
aléatoires Xn (nombre de clients dans la queue).
· La troisième partie permet de montrer que, sous certaines hypothèses
supplémentaires, la suite des fonctions caractéristiques des Xn converge
simplement
vers une fonction donnée.
· Enfin, dans la dernière partie, on montre que les hypothèses de la partie
précédentes sont bien vérifiées lorsque la loi commune aux An est une certaine
loi
géométrique, et on identifie la « loi limite » de la suite (Xn )nN .
L'épreuve est d'une longueur très raisonnable et de nombreuses questions sont
des applications assez directes du cours de probabilités du nouveau programme ;
les
principales difficultés sont finalement plutôt du domaine de l'analyse, les
techniques
de sommation et de majoration devant être correctement maîtrisées.
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Indications
Partie 1
1 Écrire X (t) sous la forme de la somme d'une série en utilisant la formule de
transfert. Invoquer ensuite le théorème de continuité pour les séries de
fonctions.
2 Montrer que, pour tout entier k, Ik = P(X = k) et en déduire que X et Y ont la
même loi.
3 Utiliser le théorème de dérivation terme à terme d'une série de fonctions.
4 L'énoncé présente une légère coquille, la variable intéressante est Z = Y - 1,
et non Y + 1.
5 Procéder par disjonction des cas, selon la valeur de Xn .
Partie 2
6 Si M > 0, choisir un réel N > M, et montrer que P(Xn > M) > P(A > N) > 0.
7 Procéder par disjonction des cas, selon la valeur de Xn .
8 Remarquer que Xn est une fonction de (A1 , A2 , . . . , An ) pour n > 1.
Partie 3
10 Partir de la décomposition 1 = 1(Xn >0) + 1(Xn =0) , multiplier par e itXn+1
puis
passer aux espérances.
13 Forcer l'apparition de Xn (t) - (t) ; le préfacteur est, en module, égal à A
(t)
que l'on pourra donc identifier à t . Après application de l'inégalité
triangulaire,
il reste un terme qui doit tendre vers 0 quand n tend vers l'infini, et qui
devient
donc « epsilonesque » pour n suffisamment grand.
14 La propriété est évidente lorsque t 2Z. Dans le cas contraire, montrer que
si ] 0 ; 1 [, alors toute suite positive vérifiant « pour tout , il existe un
entier
à partir duquel vn+1 6 vn + » converge vers 0.
Partie 4
15 Exprimer A sous la forme d'une série trigonométrique puis utiliser la
question 2.
16 Ne pas oublier de montrer que A est à valeurs dans N, que P(A > n) > 0 pour
tout entier n, que A (t) < 1 pour tout t / 2Z, et que E[A] = ] 0 ; 1 [. 17 L'énoncé ne le précise pas, mais la variable Y est une variable dont la fonction caractéristique est . © Éditions H&K 1. Fonction caractéristique 1 La formule de transfert permet d'expliciter l'espérance de e itX , qui existe bien puisque e itX est bornée en module par 1 : + P t R X (t) = E[e itX ] = pn e int n=0 où l'on a noté pn = P(X = n) pour tout entier n. Définissons la suite de fonctions (un )nN par un : t 7 pn e int . Chaque fonction un est continue, bornée et + P P kun k = pn pour tout n N. Comme pn = 1, la série de fonctions un converge n=0 donc normalement et, en particulier, elle converge uniformément. Un théorème du cours assure alors que sa somme est continue. En conclusion, X est continue sur R. P Lorsqu'une série de fonctions un converge simplement et a pour somme une fonction F, alors certaines propriétés sont conservées par passage à la limite simple, comme la périodicité, la croissance, la convexité (en filière MP)... et d'une manière générale toutes les propriétés qui ne demandent qu'à comparer des valeurs de F en un nombre fini de points (propriétés ponctuelles). En revanche, la continuité des un et la convergence simple n'assurent pas en général la continuité de F : on doit montrer que la série converge uniformément (par exemple parce qu'elle converge normalement), au moins localement, c'est-à-dire sur tout segment de l'intervalle de définition. Enfin, chaque un est une fonction 2-périodique ; notamment, puisque toutes les séries convergent, on a pour tout réel t : + + P P X (t + 2) = un (t + 2) = un (t) = X (t) n=0 donc n=0 X est 2-périodique. Puisque X est continue et 2-périodique, on en déduit qu'elle est bornée. Cependant, il est aisé de montrer ce résultat directement : grâce à la convergence absolue de la série de fonctions, on a + t R X (t) 6 P + pn e int = n=0 P pn = 1 n=0 Ce résultat reste d'ailleurs vrai lorsque X est une variable aléatoire quelconque (pas forcément à valeurs dans N). 2 Soit k un entier naturel. En écrivant + t [ 0 ; 2 ] X (t) = P P(X = n) e int n=0 on obtient Ik = 1 2 Z + P - n=0 P(X = n) e i(n-k)t dt | {z } =vn (t) © Éditions H&K P Puisque kvn k = P(X = n) pour tout nP N, la série numérique kvn k converge, c'est-à-dire que la série de fonctions vn converge normalement, et donc uniformément. Ainsi, on peut intégrer terme à terme dans l'égalité précédente : Z + X 1 i(n-k)t e dt Ik = P(X = n) · 2 - n=0 Or, un résultat extrêmement classique est le suivant : ( Z 1 i(p-q)t 1 p, q Z e dt = p,q = 2 - 0 si p = q sinon En effet, si p = q, on intègre la fonction constante égale à 1, et si p 6= q, on sait calculer une primitive de t 7 e i(p-q)t , qui est t 7 e i(p-q)t /i(p - q) et est donc 2-périodique. En conclusion, on a donc montré que + P Ik = P(X = n) n,k = P(X = k) n=0 Ceci étant valable pour tout k N, on a donc déduit la loi de X de la connaissance de sa fonction caractéristique. Notamment, si X et Y ont même fonction caractéristique, alors pour tout entier naturel k, on a Z Z 1 1 Y (t) e -ikt dt = X (t) e -ikt dt = P(X = k) P(Y = k) = 2 - 2 - Deux variables aléatoires à valeurs dans N ayant même fonction caractéristique ont même loi. Le but de cette question est de montrer que la fonction caractéristique caractérise la loi, c'est-à-dire que la connaissance de X suffit (du moins du point de vue théorique) à déterminer entièrement la loi de X. Notamment, deux variables aléatoires ayant même fonction caractéristique ont même loi. La démonstration générale de cette propriété est assez délicate ; s'agissant de lois discrètes à valeurs dans N, elle est beaucoup plus facile. 3 On suppose que « E[X] < + », c'est-à-dire que X admet une espérance. On rappelle que l'on a noté, dans la question 1, un : t 7 pn e int pour tout n N ; ce sont des 1 fonctions de classe C 1 . On peut alors montrer que P X est de classe C en prouvant la convergence uniforme de la série des dérivées un . Puisque un : t 7- in pn e int on a donc kun k = n pn n N P Or, dire que X P admet une espérance, c'est précisément dire que la série n pn converge. Ainsi, un converge normalement, et donc uniformément. Le théorème de dérivation terme à terme d'une série de fonctions assure que X est de classe C 1 + et que, de plus X : t 7- X (0) = P in pn e int n=0 + Notamment, P in pn = i E[X] n=0