Thème de l'épreuve | Les fonctions de Lambert |
Principaux outils utilisés | Fonctions de la variable réelle, probabilités, séries entières, suite de fonctions |
Mots clefs | fonction réciproque, inéquation, inégalié de Markov, produit de Cauchy, convergence uniforme, fonction de Lambert |
Mathématiques 2 T PSI © CONCOURS CENTRALE-SUPÉLEC 4 heures Caleulatrice autorisés (CN Les fonctions de Lambert Objectifs L'objet de ce problème est l'étude de différentes propriétés des fonctions de Lambert ainsi que leur application en probabilités. Dépendance des parties Les fonctions Vet W définies dans la partie I sont utilisées dans les parties IT, IIT et IV. Les parties IT, III et IV sont indépendantes les unes des autres. Notations n Pour des entiers k et n avec 0 < k < n, le coefficient binomial « k parmi n » est noté | 1) : Lorsque k < n, [k,n] représente l'ensemble des nombres entiers compris, au sens large, entre k et n. I Fonctions de Lambert Dans cette partie, on définit les fonctions de Lambert et on étudie certaines de leurs propriétés. On considère, dans toute cette partie, l'application f: R -- R * [x he" Q 1. Justifier que l'application f réalise une bijection de l'intervalle [--1, +o{ sur l'intervalle [--e-t, +00. Dans la suite du sujet, la réciproque de cette bijection est notée W. On rappelle que ceci signifie que, pour tout réel x > --e !, W(x) est l'unique solution de l'équation f(t) = x (équation d'inconnue t EUR [---1, +/). Q 2. Justifier que W est continue sur [--e-!, +oo[ et est de classe C® sur ]-e"!, +oof. Q 3. Expliciter W(0) et W"(0). Q 4. Déterminer un équivalent de W(x) lorsque x -- 0 ainsi qu'un équivalent de W(x) lorsque x -- +oo. Q 5. Tracer, sur le même dessin, les courbes EUR; et Cy, représentatives des fonctions f et W. Préciser les tangentes aux deux courbes au point d'abscisse 0 ainsi que la tangente à © au point d'abscise --e"{. Q 6. Pour quelles valeurs du paramètre réel a la fonction x H x*W(x) est-elle intégrable sur ]0, 1] ? Q 7. Pour quelles valeurs du paramètre réel a la fonction x + x*W(x) est-elle intégrable sur [1, +oo![ ? Q 8. Démontrer que l'application f réalise une bijection de l'intervalle ]Ï---c, --1] sur l'intervalle [-e"!, 0[. Dans la suite du sujet, la réciproque de cette bijection est notée V. Q 9. Pour un paramètre réel m, on considère l'équation d'inconnue x EUR R ze? = m (L.1) Déterminer, en fonction de m, le nombre de solutions de (1.1). Expliciter les solutions éventuelles à l'aide des fonctions V'et W. Q 10. Pour un paramètre réel m, on considère l'inéquation d'inconnue zx EUR R ze?0. On note X le nombre de billets gagnants tirés au cours d'une journée et on admet que X est également une variable aléatoire. Pour que l'opération soit rentable, le commerçant souhaite que la probabilité de gagner au moins deux lots durant la même journée soit faible. On considère donc un réel & EUR |0, 1] et on souhaite réaliser la condition P(X >2)<1-- a. (IL.1) Cependant, pour que l'opération intéresse les clients, le commerçant souhaite également que » soit le plus grand possible, tout en réalisant la condition (IL.1). Q 12. Démontrer que ZX suit une loi de Poisson de paramètre Ap. Donner l'espérance et la variance de X. -- à , alors la condition (IL.1) est satisfaite. 1 Q 13. En utilisant l'inégalité de Markov, démontrer que si p < 2 Q 14. On pose x = --(Àp + 1). Démontrer que la condition (IL.1) est équivalente à la condition re? <--ae |. Q 15. En utilisant l'une des fonctions V et W (définies dans la partie I) et la question 10, discuter selon la position de À par rapport à --1 -- V(--ae !) l'existence d'un plus grand réel p EUR ]0,1| satisfaisant la condi- tion (IL.1). II. B --- Deuxième situation Un message constitué d'une suite de bits est transmis sur un canal. Cependant, ce canal n'est pas fiable : chaque bit risque d'être inversé, indépendamment des autres, avec la probabilité 1 -- p EUR |0,1[. Pour fiabiliser la transmission, on découpe le message et on transmet des blocs de r bits. Chaque bloc comprend à la fois des bits du message d'origine et des bits supplémentaires qui permettent de détecter et corriger une erreur. On note X le nombre d'inversions survenues lors de la transmission d'un bloc de r bits et on admet que X est une variable aléatoire. Pour que la transmission soit suffisamment fiable, on souhaite que la probabilité qu'il y ait au moins deux erreurs dans un même paquet soit faible. Plus précisément, on considère a EUR [0,1[ et on veut réaliser la condition PIX >2)<1--a (IL.2) Pour que le codage soit efficace, on souhaite de plus que 7 soit le plus grand possible, tout en réalisant la condition (11.2). Q 16. Déterminer la loi de X, son espérance et sa variance. 1 -- Q 17. En utilisant l'inégalité de Markov, démontrer que si r < 2 --, alors la condition (II.2) est satisfaite. p In(p) p -- 1 Q 18. On pose a -- et x = rIn(p)--a. Démontrer que la condition (IL.2) est équivalente à la condition xe L--aac "*. Q 19. En utilisant l'une des fonctions Vet W (définies dans la partie TL) et la question 10, étudier l'existence d'un plus grand entier naturel r satisfaisant la condition (IL.2). Q 20. Lorsqu'il existe, exprimer cet entier en fonction de p, a et a à l'aide d'une des fonctions V ou W. 2020-01-28 18:32:15 Page 2/4 CO) 8Y-Nc-sA IIT Développement en série entière Le but de cette partie est d'établir que la fonction W définie dans la partie I est développable en série entière et de préciser son développement ainsi que son rayon de convergence. Pour cela, on commence par établir un résultat de nature algébrique. IIT.ÀA -- Le théorème binomial d'Abel On considère dans cette partie un entier naturel n ainsi qu'un nombre complexe a. On définit une famille de polynômes (4,,A,,...,AÀ,,) en posant 1 AA(X -- ka). A =1 et, pour tout kEUR [l,n], A, -- L On note C,,[X] le C-espace vectoriel des polynômes à coefficients complexes et de degré inférieur ou égal à n. Q 21. Démontrer que la famille (A,,..., A, ) est une base de C,,[X|. Q 22. Démontrer que pour tout k EUR [1,n], A/(X) = A4 ;(X -- a). Q 23. En déduire, pour j et k éléments de [0,n], la valeur de A) (ja). On distinguera suivant que j < k, j=kouj>k. Soit P un élément de C,,|X] et soient ap,....,a,, des nombres complexes tels que Tv k=0 Q 24. Démontrer que, pour tout j EUR [0,n], a; -- PÜ)(ja). Q 25. En déduire l'identité binomiale d'Abel : V(a,æ,y) EUR C", (x + y)" = y" + > f.) x(x -- ka) y + ka)". k=1 Q 26. Établir la relation. fn V(a,y) EUR C*, ny 1 = ka) (y + ka)" À. (a, y) y 2 | 1). J°l(y + ka) ITI.B --- Développement en série entière de la fonction W On définit une suite (a,,),-, en posant, mini Vn EUR N", An = n) n! +00 On définit, lorsque c'est possible, S(x) -- > ant". n=1l Q 27. Déterminer le rayon de convergence À de la série entière Ù ax". n>1l Q 28. Justifier que la fonction S est de classe C® sur |--R, R| et, pour tout entier n EUR N, exprimer S (a) (0) en fonction de n. Q 29. Démontrer que la fonction S est définie et continue sur [---R, R|. Q 30. Démontrer que, Vx e]-R,R|, x(1 + S(x))S'(x) = S(x). On pourra utiliser le résultat de la question 26. : R On considère la fonction À : LR RL S(x) x RH S(x)e? Q 31. Démontrer que h est solution sur | --R, R| de l'équation différentielle xy° -- y = 0. Q 32. Résoudre l'équation différentielle xy° -- y = 0 sur chacun des intervalles |0, R|, | --R, 0! puis sur l'inter- valle |--R, R[. Q 33. En déduire que, Vzæe]-R,R|, S(x) = Wix). Q 34. Ce résultat reste-t-il vrai sur [--R, R] ? 2020-01-28 18:32:15 Page 3/4 CO) 8Y-Nc-sA IV Approximation de W On définit dans cette partie une suite de fonctions (w,,),-, et on étudie sa convergence vers la fonction W définie dans la partie I. Pour tout réel positif x, on considère la fonction ©, définie par b.: KR -- R lé H xexp(---xexp(--t)) et on définit, sur R, une suite de fonctions (w,,),-0 par, x + Wo (x) -- 1 Vx EUR KR", ques = p,(w,(x)) Q 35. Démontrer que, pour tout réel positif x, W(x) est un point fixe de @,, c'est-à-dire une solution de l'équation ®,(t) = t. Q 36. Démontrer que, pour tout réel positif x, la fonction ©, est de classe C° sur R et que VEER, 0<@'(t)< oel8 Q 37. En déduire que T TL Vrel0,e, ne, a, (æ) -- W(x)l < (©) 1 W(x)|. Q 38. Pour tout réel a EUR |0,e|, justifier que la suite de fonctions (w,,) converge uniformément sur |0, a] vers la fonction W. Q 39. La suite de fonctions (w,,) converge-t-elle uniformément vers W sur [0, el ? nm ee eFINee.e 2020-01-28 18:32:15 Page 4/4 CO) 8Y-Nc-sA
© Éditions H&K Centrale Maths 2 PSI 2020 -- Corrigé Ce corrigé est proposé par Bertrand Wiel (professeur en CPGE) ; il a été relu par Jean-Paul Bonnet (professeur en CPGE) et Benjamin Monmege (enseignantchercheur à l'université). Le sujet porte sur les deux branches réelles de la fonction W de Lambert. Il s'agit des fonctions réciproques des restrictions de la fonction f : x 7 xe x sur chacun des intervalles ] - ; -1 ] et [ -1 ; + [. La fonction W de Lambert ne pouvant être exprimée à l'aide des fonctions usuelles, le problème met en oeuvre différentes techniques d'analyse pour la décrire et en donner des propriétés. · Dans la partie I, on s'intéresse à la définition, la régularité, les variations et l'étude en 0 et + de la branche W et on en trace la courbe représentative. L'objectif est de pouvoir déterminer les solutions de l'inéquation xe x 6 m (I.2) sous forme d'intervalles dont les extrémités sont fonctions de W et d'une seconde branche, notée V. Bien qu'elle ne mobilise pour l'essentiel que des techniques d'analyse de début de première année, cette partie est assez délicate. En particulier, il faut rédiger soigneusement la résolution des inéquations. · Dans la partie II, on se ramène à l'inéquation (I.2) en appliquant l'inégalité de Markov à des variables aléatoires qui suivent une loi de Poisson dans un premier cas et une loi binomiale dans un second. Les questions 15 et 19 font intervenir la partie I pour discuter l'existence de solutions optimales. C'est l'occasion pour le candidat de montrer sa bonne maîtrise des calculs sur ces lois. · La première moitié de la partie III consiste à établir un « théorème binomial d'Abel » à l'aide de calculs polynomiaux bien guidés. La suite permet de vérifier que W est développable en série entière en utilisant le théorème précédent, un produit de Cauchy et les solutions d'une équation différentielle du premier ordre. Les principales techniques sur les séries, séries de fonctions et séries entières sont utilisées. · La dernière partie établit la convergence uniforme d'une série de fonctions vers W en utilisant une méthode de point fixe. Des techniques d'analyse plus fines sont utilisées à la dernière question afin d'étendre l'intervalle de convergence. Ce problème est riche : il comporte 39 questions, fait appel aux programmes de première et seconde années d'analyse, probabilités et (légèrement) d'algèbre. L'ensemble est bien guidé et intéressant. La fin de la première partie, ainsi que les questions 19 et 39 demandent plus d'initiative. Plusieurs questions (6, 7, 11, 21, calculs de variance aux questions 12 et 16) ne sont pas nécessaires au reste du problème et semblent destinées à tester les connaissances des candidats. La principale difficulté du sujet vient de la manipulation répétée en début de problème d'inéquations impliquant des fonctions non usuelles. Le candidat doit trouver le bon équilibre entre des raisonnements géométriques efficaces, mais qui peuvent être incomplets, et une rédaction rigoureuse mais difficile à suivre et pouvant faire perdre beaucoup de temps. Ceci est d'autant plus regrettable que les questions les plus faciles et les techniques les plus travaillées en seconde année se trouvent vers la fin du problème. © Éditions H&K Indications Partie I 1 Appliquer le théorème de la bijection monotone à la fonction f . 4 Utiliser la relation f (W(x)) = x. Au voisinage de 0, noter que e W(x) 1. Pour l'équivalent en +, justifier que ln(x) = W(x) + ln(W(x)) pour x > 0, puis que ln(W(x)) est négligeable devant W(x) quand x +. 5 Déduire les tangentes à CW de celles de Cf par symétrie par rapport à la droite d'équation y = x. 9 Résoudre l'équation sur chaque intervalle ] - ; -1 [ et [ -1 ; + [ puis réunir les solutions trouvées. 10 Procéder par disjonction de cas suivant la valeur du paramètre m. 11 Se ramener à une équation de la forme étudiée à la question 9. Partie II 12 Déterminer les probabilités conditionnelles sachant les événements (N = n) puis appliquer la formule des probabilités totales. 15 Utiliser la question 10 pour établir que si p est solution, la variable x = -(p + 1) doit appartenir à V(-e -1 ) ; W(-e -1 ) . 19 Prouver 0 < a < 1 puis -e -1 < -ae a < 0. En déduire que si p est solution, la variable x doit appartenir à [ V(-ae a ) ; W(-ae a ) ]. Vérifier, à l'aide des variations de V et W, que -a appartient à ce segment et montrer que r existe quel que soit p. Partie III 23 Déduire de la question 22 une expression simple de Ak (j) . 25 Appliquer le résultat de la question 22 au polynôme (X + y)n . 26 Dériver l'expression établie à la question précédente et l'évaluer en x = 0. 27 Utiliser la règle de d'Alembert. 29 Appliquer le théorème de continuité de la somme d'une série de fonctions. Utiliser la formule de Stirling pour obtenir un équivalent simple d'un majorant de la norme. 30 Former un produit de Cauchy. 33 Montrer à l'aide de la question 32 et des valeurs de S(0) et S0 (0), déterminées à la question 28, que h = f s est la fonction identité. Utiliser le résultat de la question 9 et justifier que si x < 0 alors S(x) > -1. Partie IV 36 Déterminer le maximum de 0x à l'aide d'une étude de fonction. 37 Appliquer l'inégalité des accroissements finis à la fonction x . 39 La réponse est positive. Utiliser la continuité de W et la question 37 pour majorer uniformément |wn (x) - W(x)| au voisinage de e. Utiliser ensuite la question 38 pour obtenir une majoration uniforme en dehors de ce voisinage. © Éditions H&K I. Fonctions de Lambert 1 Appliquons le théorème de la bijection monotone à f sur l'intervalle [ -1 ; + [. C'est une application dérivable (et donc continue) sur R, car produit de fonctions dérivables. Pour tout réel x > -1, f 0 (x) = e x + xe x = e x (1 + x) > 0 La fonction f est donc strictement croissante sur [ -1 ; + [. D'après le théorème de la bijection monotone, elle réalise une bijection de l'intervalle [ -1 ; + [ sur son intervalle image. Comme f (-1) = -e -1 et f (x) = xe x ---- + x+ et que f est strictement croissante et continue sur l'intervalle [ -1 ; + [, l'intervalle image est -e -1 ; + . On a montré L'application f réalise une bijection de [ -1 ; + [ sur -e -1 ; + . Le théorème de la bijection monotone fournit deux autres résultats : la conti nuité et la croissance stricte de la fonction réciproque sur -e -1 ; + . Ils seront utilisés aux questions 2 et 4 et devront être justifiés au moment de la réponse à ces questions. 2 Une conséquence directe de la mise en oeuvre du théorème de la bijection monotone à la question précédente est que La fonction W est continue sur l'intervalle -e -1 ; + . Par ailleurs, l'application f étant de classe C sur R, comme produit de fonctions de classe C , et puisque sa dérivée ne s'annule pas sur ] -1 ; + [, La fonction W est de classe C sur l'intervalle -e -1 ; + . 3 Évaluons l'identité W f = id en 0. Puisque f (0) = 0, il vient W(0) = 0 D'après la question précédente, W est dérivable en 0 -e -1 ; + et d'après le théorème de dérivation des fonctions réciproques W0 (0) = 1 f 0 (W(0)) =1 4 Pour tout x -e -1 ; + , on a la relation x = f (W(x)) = W(x)e W(x) (1) La fonction W est continue en 0 et W(0) = 0, d'où e W(x) 1 et par quotient x0 d'équivalents, on obtient W(x) x x0 © Éditions H&K On aurait aussi pu appliquer le théorème de Taylor-Young à la fonction W en 0. Puisqu'elle est de classe C au voisinage de 0, elle admet un développement limité à tout ordre, en particulier à l'ordre 1 : W(x) = W(0) + W0 (0)(x - 0) + o (x) x0 ce qui fournit l'équivalent recherché. Déterminons à présent un équivalent de W(x) en +. Soit un réel x > 0, la relation (1) justifie W(x) > 0. Appliquons la fonction ln : ln(x) = ln W(x)e W(x) = ln(W(x)) + W(x) (2) Comme la fonction W est strictement croissante et non bornée, elle tend vers + quand x +. On en déduit par croissances comparées ln(W(x)) ---- 0 W(x) x+ donc ln(W(x)) est négligeable devant W(x) quand x +. Finalement, d'après (2) : W(x) x+ ln(x) 5 Les fonctions f et W sont dérivables en 0 et prennent la même valeur en 0, ainsi que leurs dérivées d'après la question 3. Leurs courbes représentatives possèdent donc une tangente commune au point d'abscisse x = 0, dont l'équation est : y = f (0) + f 0 (0)(x - 0) = W(0) + W0 (0)(x - 0) = x Les courbes Cf et CW ont comme tangente commune la droite d'équation y = x, au point d'abscisse 0. y Cf CW 1 -1 -e -1 y=x 1 x 0 -e -1 -1