Thème de l'épreuve | Polynômes à racines toutes réelles |
Principaux outils utilisés | polynômes, suites, produit scalaire, série génératrice finie, formes linéaires, séries entières |
Mots clefs | Laguerre, Polya-Schur, Rolle, Vandermonde |
A2021 - MATH II PC Cm Concours commun Mines-Ponts ÉCOLE DES PONTS PARISTECH, ISAE-SUPAERO, ENSTA PARIS, TÉLÉCOM PARIS, MINES PARIS, MINES SAINT-ÉTIENNE, MINES NANCY, IMT ATLANTIQUE, ENSAE PARIS, CHIMIE PARISTECH - PSL. Concours Mines-Télécom, Concours Centrale-Supélec (Cycle International). CONCOURS 2021 DEUXIÈME ÉPREUVE DE MATHÉMATIQUES Durée de l'épreuve : 3 heures L'usage de la calculatrice et de tout dispositif électronique est interdit. Les candidats sont priés de mentionner de façon apparente sur la première page de la copie : MATHÉMATIQUES II - PC L'énoncé de cette épreuve comporte 6 pages de texte. Si, au cours de l'épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être une erreur d'énontcé, il le signale sur sa copie et poursuit sa composition en expliquant les raisons des initiatives qu'il est amené à prendre. Les sujets sont la propriété du GIP CCMEP. Ils sont publiés sous les termes de la licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 3.0 France. Tout autre usage est soumis à une autorisation préalable du Concours commun Mines Ponts. Polynômes à racines toutes réelles Notations Pour tout 0 < k < n, on notera (r) -- HE le coefficient binomial où nl = n(n --1)-..2.1. On note C©(R) les fonctions f : R -- R de classe C®. On dit que a est un zéro d'ordre m > 0 de f EUR C(R) si f(a)= Pa)=.= fr 0 (a)=0 et (a) #0 Dans la suite du texte quand on liste les zéros d'un polynôme on répètera chaque racine autant de fois que sa multiplicité : ainsi les racines de XY(X -- 1)* sont 0,0,0,1,1. On note D : CP(R) --> C©(R) l'opérateur de dérivation, i.e. D(f) = f'. Pour Q=5;_par XF EUR R[|X|, on note Q(D) l'opérateur défini par Q(D) : C'(R) -- CR) J-- 5 ax D*(f). k=0 c'est-à-dire que Q(D) f(x) = > ax f (x) où f(* est la fonction dérivée k-ème. Log-concavité des suites Soit (&o,:°- ,a,) une suite à valeurs réelles. On dira qu'elle est unimodulaire s'il existe 0 < 3 < n tel que ao @j-14j+1 ; ultra log-concave si ONE est log-concave. k Montrer que la suite binomiale (5) k=0,... n est log-concave. Montrer que si (ax)x-o.....n est ultra log-concave, alors elle est log-concave. Montrer que si (ag)x-o....n est strictement positive et log-concave, alors elle est unimodulaire. Polynômes réels à racines toutes réelles Soit P(X) = ao + aX +--.+a,X" EUR RÎX] avec a, # 0. Il est dit à racines toutes réelles si toutes ses racines complexes sont en fait réelles, i.e. P(z) = 0 implique z EUR R. On suppose dans cette question que P est à racines toutes réelles. 4 > Montrer que P' est à racines toutes réelles. Indication : on pourra utiliser le théorème de Rolle en veillant aux multiplicités des racines. 5 > Montrer que Q(X) = X"P(1/X) est un polynôme à racines toutes réelles. Indication : on commencera par préciser le degré de Q(X). 6 > Pour 1Soit a EUR R. Montrer que e®D(e 7% P{x)) est un polynôme à racines toutes réelles. Indication : on pourra à nouveau utiliser le théorème de Rolle en considérant en outre le comportement en +oco. 8 > Soient P(X) = > ou X" et Q(X) = 1,0; X7 des polynômes réels à racines toutes réelles. Montrer que Q(D)P(X) est un polynôme à racines toutes réelles. Dans la question 27 & , nous utiliserons le théorème de composition de Schur suivant, que nous admettons. Théorème 1 Soient P(X) = Ya X* et Q(X) = >"250;X7 des polynômes réels à racines toutes réelles. On suppose en outre que les racines de Q ont toutes le même signe. Alors le polynôme min(n,m) k=--0 est à racines toutes réelles. Quelques exemples Soit À une matrice symétrique réelle de taille n. 9 > Montrer que son polynôme caractéristique Y4(X) est à racines toutes réelles. 10 > On suppose que toutes les racines de x4(X) sont positives. Montrer l'existence d'une matrice symétrique C' telle que À = C*. 11 > Soit B une matrice symétrique et on suppose comme dans la question précédente que les racines de Y1(X) sont positives. Montrer que les valeurs propres de AB sont toutes réelles. On considère | RIX]XRIX] -- R 7. (P,Q) = n° P(x)Q(x)e "dr. 12 > Montrer que & définit un produit scalaire sur R|[X|. 13 © Justifier (on ne demande pas de les calculer) qu'il existe une famille (L,),en de R|X| vérifiant les propriétés suivantes : -- les L; sont de degré 1 ; -- pour tout 0 Montrer que pour tout n > 1, le polynôme /Z,, est à racines toutes réelles. Soit 2.) une suite de variables aléatoires de Bernouilli B(b;) indépendantes sl, ,n de paramètres respectifs b;, ie. P(B; = 1) = b; et P(B; = 0) = 1 -- b;. Soit alors B =; B, et soit P(X) -- SX" k=0 où px = P(B = k). 15 > Montrer que P(X) est à racines toutes réelles. 16 > Soit P(X) = Y}_,pX" EUR RIX] à coefficients positifs, Le. px > 0 pour tout k -- 0,--: ,n. On suppose en outre que P est à racines toutes réelles et que P(1) = 1. Montrer alors qu'il existe des variables de Bernouilli indépendantes B; telles que pour tout & = 0,-:- ,n,ona pm = POS, B; =k). Théorème de Hermite-Sylvester Soit P EUR RÎX) de degré n. On note a1,--:,a, les racines réelles distinctes de P et Bi, B1°°:,0, 0, Ses racines complexes non réelles, où 5; désigne le conjugué de B;. On note m; la multiplicité de a; et n; celle de b; et 5;. Pour tout k& > 0, on introduit T S _+ se = D moi + D on;(8; + B;). i=1 j=1 On introduit les applications linéaires (x : C" --=> C définies par PR(ti, te" En) = Diag i=1 ainsi que n DACAE °° Tn) -- Y ab i=1 -- il On notera aussi d,(21,:-- ,2n) = D mi 17 > Montrer que (@1,:::,4,,%1,%,,::: ,%,, 0.) est une famille libre. Indication : on pourra utiliser les matrices de Vandermonde. 18 > Montrer que q(æ,: "° ,Tn) -- D Mrpr(ti. "T° Tr) + k=1 5 -- > TE (ua, T° Tn)" + DACAE _- En) ); k=1 s'écrit sous la forme q(t1,::+ ,%n) = 35,21 Sir -otits. 19 > Montrer que si P est à racines toutes réelles, alors g : R? ---- R définie par Qt," ,Tn) = Yi; Sir5-2tit;, est à valeurs positives. On suppose à présent 7 < n et on écrit pour tout 4 = 1,---,s V2 + = 2Re(y) -- 21m(u;)°. 20 > Montrer que les applications linéaires R° -- R suivantes sont R-linéairement indépendantes : Pi: >: Pr; Re(:), Im(x:), TT , Res), Im(x.). 21 > Conclure que P est à racines toutes réelles si et seulement si q est à valeurs positives sur R7. Indication : on pourra utiliser, sans justification, l'existence d'un vecteur (t1,--- ,4n) EUR R' qui annule toutes les formes linéaires de la question précédente sauf une au Choïx. Suite multiplicative de Polya-Schur Étant donnée une suite réelle (jy)reN, on considère l'opérateur F : R[X] --+ R|X] défini par la formule k=0 k=0 Une suite (Jh)nen est dite multiplicative au sens de Polya-Schur si l'opérateur l préserve l'ensemble des polynômes à racines toutes réelles, 1.e. si P a toutes ses racines réelles alors l'(P) aussi. 22 > Montrer que la suite définie par 7, = n est multiplicative au sens de Polya-Schur. 23 > Montrer que si (}»)h>0 est multiplicative au sens de Polya-Schur alors pour tout k > 0, la suite (y )n>r = (9%, Yk21,°-*) l'est aussi. Soit P(X) = ag + a X +... +a, XX" avec a, % 0. On suppose que P a toutes ses racines réelles : on les note æ1 < %2 < --- < x,. On rappelle que -- = D}, ty; et on An-2 __ admet que 2 = D'iéicjen tit; de sorte que nm 2 2 2 A _1 -- ZAnAn-2 = y ) T3. k=1 24 & Soit (y»}n>0 une suite non nulle, multiplicative au sens de Polya-Schur et on suppose qu'il existe k > 0 tel que 7; = 0 avec 5-1 Æ 0. Montrer que 411 = O0 puis que Ym = 0 pour tout m > K. Indication : on pourra utiliser les expressions de T((14+X)*T1) et EXT XFN), puis, pour m > k +2, raisonner sur les racines de T'((1+X)"). 25 > On suppose que la suite multiplicative (y,),>0 ne s'annule jamais. Montrer alors quelle est soit de signe constant, soit alternée. Indication : on pourra utiliser encore l'expression de TXT -- XE1. Théorème de Polya-Schur On considère à présent une suite (/»)1>0 strictement positive, i.e. 7, > 0 pour tout n > (0. On suppose que (y»)1>0 est multiplicative au sens de Polya-Schur. 26 > Montrer que Q,(X) = 59% ()X * a toutes ses racines réelles et négatives. Réciproquement supposons que Q,(X) = 30% (x * a toutes ses racines réelles négatives. On fait le changement de variable x = z/n, de sorte que P()= DES) (1 k e 2: a toutes ses racines réelles et négatives. 27 © En utilisant le théorème 1, montrer que (,)1>0 est multiplicative au sens de Polya- Schur. On suppose que (y»)1>0 est multiplicative au sens de Polya-Schur. 28 > Montrer que (y)}nen est log-concave, ie. 42 > 119% 1 pour tout # > 1. 29 > En déduire que la série entière > ,-0/n2" à un rayon de convergence strictement positif. 30 © En déduire que »},:9 2" à un rayon de convergence infini et peut s'obtenir comme la limite uniforme sur tout intervalle fermé borné de R, de polynômes à racines toutes réelles et négatives. 31 > Réciproquement montrer que si »,>0 x" a un rayon de convergence infini et peut s'obtenir comme la limite uniforme, sur tout intervalle fermé borné de R,, de polynômes à racines toutes réelles et négatives, alors (4,)1>0 est multiplicative au sens de Polya-Schur. Indication : pour cette question, toute tentative de réponse, partielle ou purement qualitative, sera considérée par le Jury. FIN DU PROBLÈME
© Éditions H&K Mines Maths 2 PC 2021 -- Corrigé Ce corrigé est proposé par Thierry Limoges (professeur en CPGE) ; il a été relu par Florian Metzger (professeur en CPGE) et Gilbert Monna (professeur honoraire en CPGE). Ce sujet est constitué de six parties relativement indépendantes. On s'intéresse aux polynômes à racines toutes réelles et à des opérations qui laissent stable cet ensemble. · La première partie aborde les suites log-concaves, dont la définition est donnée dans l'énoncé. · La partie II étudie les polynômes à racines toutes réelles, notamment leur stabilité par dérivation et par l'application linéaire P 7- P0 - P. · Dans la partie suivante, on donne des exemples de polynômes à racines toutes réelles : polynôme caractéristique de matrice, polynômes orthogonaux pour un produit scalaire, ou série génératrice d'une variable aléatoire finie. · La quatrième partie caractérise les polynômes à racines toutes réelles par la positivité d'une forme quadratique, une application qui s'écrit comme somme de carrés de formes linéaires. C'est le théorème de Hermite-Sylvester. · Dans la partie V, on étudie les suites multiplicatives de Pólya-Schur : ce sont celles qui conservent le caractère réel des racines d'un polynôme lorsqu'on multiplie ses coefficients par ceux de la suite terme à terme. · La dernière partie établit le théorème de Pólya-Schur qui caractérise les suites multiplicatives du même nom. Hormis la troisième partie et les trois dernières questions, ce sujet n'utilise que des outils de PCSI. Des questions proches du cours sont intercalées avec d'autres qui sont hautement techniques. On utilise de l'algèbre, de l'analyse et un soupçon de probabilités. Ce sujet peut être étudié dès la première année ou pour réviser. Enfin, on pourra laisser de côté la dernière question car elle est hors programme. © Éditions H&K Indications Log-concavité des suites 2 Appliquer la définition et utiliser le résultat de la question 1. 3 Montrer que si aj+1 6 aj pour un indice j, c'est encore le cas pour les paires d'indices consécutifs suivants. Polynômes réels à racines toutes réelles 4 Invoquer que si est une racine multiple de P, alors c'est aussi une racine de P0 . Appliquer le théorème de Rolle entre deux racines de P. 5 Exprimer le degré de Q en fonction de la multiplicité de 0 comme racine de P lorsque P(0) = 0. Remarquer que les racines de Q sont les inverses des racines non nulles de P. 6 Calculer explicitement Q et utiliser la positivité de son discriminant lorsque celuici est de degré 2. 7 Traiter séparément le cas = 0. Appliquer le même raisonnement qu'à la question 4 puis exprimer la somme des racines du polynôme en fonction des coefficients. 8 Factoriser Q et remarquer que (X - )(D) = D - id. Quelques exemples 9 Utiliser le théorème spectral. 10 Diagonaliser A et prendre la racine carrée de ses valeurs propres. 11 Montrer que C2 B (X) = CBC (X) d'abord pour C inversible, puis modifier légèrement les valeurs propres de C et passer à la limite. 12 Vérifier la convergence en comparant à une intégrale de Riemann. Utiliser qu'une fonction continue positive d'intégrale nulle sur un intervalle est nulle. 13 Appliquer l'algorithme d'orthonormalisation de Gram-Schmidt puis montrer la propriété sur le degré par récurrence. r 14 Utiliser l'orthogonalité de Ln avec (X - i ) lorsque r < n et 1 , . . . , r sont les i=1 racines réelles de Ln . 15 Utiliser que la série génératrice d'une somme de variables aléatoires mutuellement indépendantes est le produit de leur séries génératrices. 16 Utiliser les calculs de la question 15 pour trouver les paramètres bi des Bi . Théorème de Hermite-Sylvester 17 Montrer que la famille (e1 , . . . , en ) définie par ei (x1 , . . . , xn ) = xi . est une base de L (Cn , C), Exprimer la matrice de la famille considérée dans cette base. 18 Dans le développement des carrés des formes linéaires, calculer explicitement les coefficients devant xi xj et remarquer qu'ils ne dépendent que de i + j. 20 Supposer qu'une combinaison linéaire de ces formes R-linéaires est nulle et montrer que celle-ci est aussi nulle sur Cn , puis utiliser le résultat de la question 17. 21 Utiliser la définition de q et l'indication de l'énoncé. © Éditions H&K Suite multiplicative de Pólya-Schur 22 Montrer que (P) = XP0 . 23 Considérer le polynôme Xk P. 24 Décaler la suite à l'aide de la question 23 puis utiliser les polynômes (1 + X)2 et X2 - 1. Raisonner par l'absurde et considérer le plus petit indice m > k tel que m 6= 0. 25 Même indication que pour la question 24. Théorème de Pólya-Schur 26 Utiliser le polynôme (1 + X)n . 27 Appliquer le théorème 1 à un polynôme P puis faire tendre n vers +. Montrer qu'un z0 C r R n'est pas racine de (P) en minorant la distance entre z0 et les racines de P Pn . 28 Utiliser le polynôme (X - 1)2 . 29 Montrer que la suite (n+1 /n )nN est décroissante, puis appliquer le critère de d'Alembert. 30 Majorer le terme général de la série et utiliser le résultat de la question 29. 31 Supposer la convergence d'une suite de polynômes vers la somme de la série entière uniforme sur un voisinage complexe de 0, ce qui implique la convergence uniforme de ses dérivées successives au voisinage de 0 d'après un théorème d'analyse complexe de niveau L3. Ensuite, utiliser le théorème 1 et le raisonnement de la question 27. © Éditions H&K Log-concavité des suites 1 Soit n N. Pour tout k [[ 0 ; n ]], posons ak = n et remarquons que ak > 0. k Soit k [[ 1 ; n - 1 ]]. Calculons 2 -1 -1 ak 2 n n n = k k-1 k+1 ak-1 ak+1 = = (n!)2 (k - 1)! (n - k + 1)! (k + 1)! (n - k - 1)! 2 (k!)2 [(n - k)!] (n!)2 k+1 n-k+1 k } n-k | {z | {z } >1 ak 2 >1 ak-1 ak+1 >1 Comme ak-1 ak+1 > 0, on a ak 2 > ak-1 ak+1 . Ceci étant vrai pour tout k [[ 1 ; n-1 ]], n est log-concave. Pour tout n N, la suite k 06k6n 2 Soient n N et k [[ 1 ; n - 1 ]]. Comme (ak )06k6n est ultra log-concave, soit ak 2 ak 2 ak-1 ak+1 2 > n n n k-1 k+1 k 2 -1 -1 n n n > ak-1 ak+1 > ak-1 ak+1 k k-1 k+1 n est log-concave d'après le résultat de la question 1. car k 06k6n Si (ak )06k6n est ultra log-concave, alors elle est log-concave. 3 Soit (ak )06k6n une suite strictement positive et log-concave. Posons j = max {k [[ 0 ; n ]] | a0 6 a1 6 · · · 6 ak } Si k = n, on pose j = n et la suite est unimodulaire. Sinon, montrons par récurrence que le prédicat P(`) : aj+` > aj+`+1 est vraie pour tout ` [[ 0 ; n - j - 1 ]]. · P(0) est vraie car par définition de j, on a aj > aj+1 . · P(`) = P(` + 1) : soit ` [[ 0 ; n - j - 1 ]] tel que P(`) est vraie. Par logconcavité de la suite on a aj+` aj+`+2 aj+`+1 > > aj+`+2 aj+`+1 car aj+` > aj+`+1 par hypothèse de récurrence et aj+`+1 > 0. Donc P(` + 1) est vraie.