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Mines Maths 1 PC 2014 -- Corrigé
Ce corrigé est proposé par François Lê (ENS Lyon) ; il a été relu par Tristan
Poullaouec (Professeur en CPGE) et Guillaume Batog (Professeur en CPGE).
Le sujet porte sur les endomorphismes d'un espace vectoriel de dimension finie
(au moins 2) qui peuvent s'écrire comme une somme finie de projecteurs. Plus
précisément, on montre que ce sont les endomorphismes à trace entière et
supérieure à
leur rang.
· La première partie demande de retrouver des résultats de cours sur les
projecteurs et la trace. En particulier, le but de la question 4 est de montrer
que trace
et rang d'un projecteur sont égaux. La partie se termine par la preuve que si
un endomorphisme est une somme de projecteurs, alors sa trace est entière et
supérieure à son rang.
· Dans la courte deuxième partie, on étudie la matrice d'un endomorphisme
quelconque dans une base particulière associée à un projecteur de rang 1.
· La troisième partie est plus technique. On y prouve que si un endomorphisme T
n'est pas une homothétie et si t1 , . . . , tn sont des réels dont la somme est
égale
à la trace de T, il existe une base dans laquelle la matrice de T a pour
éléments
diagonaux les réels t1 , . . . , tn .
· Enfin, la quatrième partie s'attache à montrer que si un endomorphisme est
à trace entière et supérieure à son rang, c'est une somme finie de projecteurs.
On utilise notamment les résultats de la troisième partie.
Le sujet mélange des questions de cours (numéros 1, 2, 3 et 5) et des questions
« classiques » (numéros 4, 11 et 13). Il faut rester vigilant et bien rédiger
le tout.
Remarquons que les notations utilisées dans le sujet sont inhabituelles : N(T)
pour
le noyau d'un endomorphisme T, R(T) pour son image, TB pour sa matrice dans
une base B. Elles peuvent déstabiliser, mais le correcteur s'attend à ce que
vous les
employiez.
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Indications
Partie 1
4 Utiliser une base de X adaptée à la décomposition obtenue à la question 3 et
chercher la matrice de P dans cette base.
6 Chercher une famille génératrice de F + G à partir d'une base de F et d'une
base
de G.
7 Pour l'inégalité Tr S > rg S, commencer par montrer, grâce au résultat de la
question 6, que si U et V sont des endomorphismes de X, alors rg (U+V) 6 rg
U+rg V.
Procéder ensuite par récurrence sur m en écrivant, pour l'étape d'hérédité,
S = (P1 + P2 + · · · + Pm-1 ) + Pm
afin d'appliquer à S l'inégalité sur le rang d'une somme.
Partie 2
8 Travailler matriciellement dans une base adaptée à la décomposition en somme
directe X = R(P) N(P).
10 Montrer la contraposée en calculant la matrice de P TP dans la base C obtenue
à la question 9.
Partie 3
11 Raisonner par l'absurde en supposant que pour tout x X, la famille (x, Tx)
est liée. Commencer par montrer que cela implique que pour tout x, Tx est
proportionnel à x. Démontrer ensuite que les coefficients de proportionnalité
ainsi
introduits sont tous égaux.
13 Procéder par récurrence sur n en utilisant la question 12 lors de l'hérédité.
14 Choisir une base B construite comme à la question 12 pour l'endomorphisme T
et
considérer les endomorphismes U et T définis par UB = Diag(t1 , t2 ) et T = T-U.
Appliquer ensuite le résultat de la question 13 à T .
16 Bien que l'énoncé laisse entendre que la récurrence est à initialiser à n =
3,
on peut avantageusement la faire commencer à n = 2, ce cas étant celui traité à
la question 14.
Partie 4
18 Commencer par trouver des entiers (positifs) t1 , . . . , t de somme Tr T
afin de
pouvoir appliquer les résultats des questions 14 et 16 à l'endomorphisme dont la
matrice dans la base B de la question 17 est T1 . Le fait de choisir des ti
positifs
sera utile pour la question suivante.
19 Décomposer la matrice obtenue à la question 18 en une somme de matrices
de projecteurs. On pourra avantageusement interpréter chacun des ti comme la
somme 1 + · · · + 1 (ti fois).
20 Se ramener au cas précédent en retranchant à T le projecteur dont la matrice
dans la base B construite à la question 18 est Diag(1, 0, . . . , 0).
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Signalons que l'utilisation par l'énoncé d'accolades pour désigner des familles
de vecteurs est sujette à discussion, puisque de telles familles ne sont pas des
ensembles. Pour cette raison, nous utiliserons dans ce corrigé des parenthèses
en lieu et place des accolades de l'énoncé.
1. Traces et projecteurs
1 Notons A = (aij )16i,j6n et B = (bij )16i,j6n . Pour calculer la trace de AB
et celle
de BA, commençons par calculer leurs éléments diagonaux. Avec la formule donnant
les termes d'une matrice produit, on a, pour tout i [[ 1 ; n ]],
(AB)ii =
n
P
et
aik bki
(BA)ii =
k=1
Par conséquent,
n
P
bik aki .
k=1
Tr (AB) =
n
P
(AB)ii =
i=1
n P
n
P
aik bki
i=1k=1
Cette somme double étant finie, on peut intervertir l'ordre de sommation, de
sorte
que
Tr (AB) =
n P
n
P
k=1i=1
soit
aik bki =
n
P
(BA)kk
k=1
Tr (AB) = Tr (BA)
2 Soient B et B deux bases de X et Q = MatB B la matrice de passage de B
à B : on sait que TB = QTB Q-1 . En utilisant le résultat de la question 1, il
vient
Tr (TB ) =
=
=
=
Tr (TB ) =
Ainsi,
Tr (QTB Q-1 )
Tr ((QTB )Q-1 )
Tr (Q-1 (QTB ))
Tr (Q-1 QTB )
Tr (TB )
La trace de TB est indépendante de la base B.
On prendra garde à ne pas faire dire au résultat de la question 1 ce qu'il
ne dit pas : de façon générale, si A, B et C sont trois matrices, alors
Tr (ABC) prend des valeurs différentes par permutation de A, B, C : par
exemple, Tr (ABC) 6= Tr (ACB) en général. Il faut donc bien grouper les
matrices avant d'utiliser la propriété Tr (AB) = Tr (BA).
3 On peut par exemple montrer que R(P) N(P) = {0} et vérifier que l'égalité de
dimensions dim X = dim R(P) + dim N(P) est vraie.
· Soit x R(P)N(P). Comme x R(P), il existe X tel que x = P(). Alors,
puisque x N(P), on a P(x) = 0 = P2 (). Or, P2 = P car P est un projecteur :
ainsi, 0 = P2 () = P(), d'où x = 0. Cela montre que R(P) N(P) {0}.
Réciproquement, on a bien 0 R(P) N(P). Ainsi, R(P) N(P) = {0}.
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· D'après la formule du rang, dim X = dim N(P) + rg P = dim N(P) + dim R(P).
En conclusion,
X = R(P) N(P)
Une autre façon de faire est de montrer que R(P) N(P) = {0} et
que X = R(P) + N(P). Pour cette dernière égalité, il est aisé de vérifier
que si x X, il se décompose selon cette somme en x = P(x) + (x - P(x)).
En effet, P(x) R(P) par définition de l'image de P et x - P(x) N(P)
car P(x - P(x)) = P(x) - P2 (x) = P(x) - P(x) = 0.
4 Déterminons la matrice de P dans une base adaptée à la décomposition en somme
directe obtenue à la question précédente afin de calculer la trace de P.
Soient (e1 , . . . , er ) une base de R(P) et (er+1 , . . . , en ) une base de
N(P).
La famille B = (e1 , . . . , er , er+1 , . . . , en ) est une base de X car X =
R(P) N(P).
Pour trouver la matrice de P dans cette base, décomposons sur celle-ci chacun
des
vecteurs P(ei ), pour tout i [[ 1 ; n ]]. Si i [[ r + 1 ; n ]], alors ei
N(P) et il vient
immédiatement P(ei ) = 0. Si maintenant i [[ 1 ; r ]], alors ei R(P) : il
existe fi
appartenant à X tel que ei = P(fi ). Dans ce cas, P(ei ) = P2 (fi ) = P(fi )
puisque P
est un projecteur. Ainsi, P(ei ) = ei lorsque i [[ 1 ; r ]]. La matrice de P
dans la
base B est donc la suivante :
e1
e2
..
.
er
er+1
..
.
en
P(e1 )
P(er ) P(er+1 )
0 ···
1 0 ··· 0
0 1
0
0 ···
..
.
..
.
. . ..
.
.
0 ··· 0 1
0
···
0 ··· ··· 0
0
···
.
.
.
..
..
..
0 ···
0 ··· ··· 0
P(en )
··· 0
··· 0
..
Ir
.
=
O
··· 0
··· 0
..
.
O
O
··· 0
D'après la question 2, la trace de P est égale à la trace de la matrice
précédente,
donc Tr P = Tr Ir = r. Autrement dit,
Tr P = rg P
5 Traitons d'abord la première égalité proposée, en procédant par double
inclusion.
Soit d'abord x R(P ) : il existe X tel que x = P (). En se souvenant que
P2 = P, on obtient
P(x) = P(P ()) = P( - P()) = P() - P() = 0
Ainsi, x N(P) pour tout x R(P ), ce qui signifie que R(P ) N(P).
Réciproquement, soit x N(P). Par définition même de P , on a P (x) = x-P(x).
Or P(x) = 0, ce qui entraîne que x = P (x). Par conséquent x R(P ) pour
tout x N(P). Autrement dit, N(P) R(P ) et finalement
R(P ) = N(P)