Thème de l'épreuve | Inégalités de Bernstein |
Principaux outils utilisés | trigonométrie, polynômes, intégration, topologie, endomorphismes |
Mots clefs | transformée de Fourier, convolution, polynômes de Tchebychev, Bernstein |
Mathématiques 2 MP 4 heures Calculatrice autorisée 2021 Inégalités de Bernstein Le but de ce problème est d'étudier les inégalités dites de Bernstein dans deux cadres différents. La première partie s'intéresse à la démonstration de l'inégalité de Bernstein pour les polynômes et à certaines applications. La deuxième partie introduit la notion de transformée de Fourier et permet d'établir une inégalité de Bernstein pour des fonctions dont la transformée de Fourier vérifie certaines propriétés. Les deux parties de ce sujet sont complètement indépendantes et peuvent être traitées dans l'ordre désiré. T Inégalité polynomiale de Bernstein et applications Dans cette partie, -- sin EUR N, on note C,,[X] le C-espace vectoriel des polynômes à coefficients complexes de degré inférieur ou égal à n ; -- si n EUR N*, on note #,, le C-espace vectoriel des fonctions f : R -- EUR vérifiant (ap) EC", 3(b,.,0,) EC", VÉER, f(6) = ao + ÿ (ax cos(kt) + by sin(kt)). k=1 On remarque que les éléments de $,, sont des fonctions bornées ; -- si Î est un intervalle non vide de R et si f est une fonction bornée de 7 dans EUR, on note lire = suplf(æ)|. xel On admet que f + |flræ(r définit une norme sur le C-espace vectoriel des fonctions bornées de 7 dans C. TI.A -- Polynômes de Tchebychev On définit la suite de polynômes (T,,),en par T5 =1,T =Xet VneN, To = 2XT,.; --T,. Q 1. Pour tout n dans N, déterminer le degré de T;,, puis montrer que (7, )5c7= ; et déduire des questions 11 et 12 que (1 --wy) 2sin(vx/2) VOER, f'(0) = L D f(O+ ) 1) (L.3) _ 2n pr Th 2 sin(çpy/2)2 Q 14. En déduire que VOER, |f"(0)1 < n|flLe(m) (L.4) I.C --- Quelques conséquences de l'inégalité (I.4) Soit nr un entier naturel non nul. Q 15. Déduire des questions 3 et 14 que VP EC, IXT, Væz EUR [1,1 P'(a) V1 2?| < nf Pier Q 16. Montrer que VQEC, AIX} [Q(DI 0, @l(t) = P,(1/tje- tt. Soit Y la fonction définie sur KR par sité]-Lil. sinon. Û VIER, (6) = Len Q 28. Montrer, en l'exprimant à l'aide de &, que 1 est de classe CT. Q 29. Soit à l'unique primitive de Y s'annulant en 0. Montrer que 6 est de classe C®, constante sur |--oo, --1] (on note À cette constante) et constante sur [1,+c| (on note B cette constante). Vérifier que À Æ B. Q 30. Construire alors une fonction p EUR C®(R), constante égale à 1 sur [--1,1] et constante égale à O0 sur R\[---2, 2|. ITI.D -- Inégalités de Bernstein On admet les formules suivantes, dites formules d'inversion de Fourier : +00 à I Le A -- si f EUR LR) et si f EUR L'(R), alors, pour tout x ER, f(x) -- 5 | eité f(£) dé : T l +00 -- si a EUR L'(R), si a est la fonction de R dans C:æx+ 5 | eltéa(£) dé, et si a EUR L!(R), alors a = à. T On remarque que ces résultats permettent d'affirmer que, si f et g sont deux fonctions continues telles que f, g, f et ÿ sont intégrables et si f = g, alors f -- g. On considère toujours la fonction p définie à la question 30. Soit r la fonction de R dans C telle que, pour tout réel x, rl) = 3e | eép(e) ae _ 27T --D Q 31. Montrer que r est dérivable sur KR et donner une expression de sa fonction dérivée (faisant éventuelle- ment intervenir une intégrale). Q 32. Montrer que x HR x*r(x) est bornée sur R et en déduire que r est intégrable et bornée sur R. On admet qu'en utilisant la même méthode, on montre que r" est intégrable et bornée sur KR. Soit À > O0 et soit f EUR L!(R) N CR) telle que fe L1(R) et telle que f soit nulle en dehors du segment |--À, À]. On note r, la fonction de R dans C telle que r,(x) = r(Ax) pour tout réel x. Q 33. On admet que f xr, est intégrable. Montrer que f = Àf *xr,. Q 34. En déduire que, si f EUR L(R), il existe une constante C' EUR R°, indépendante de À et de f, telle que 1F le < CAN Fe: ee erINesee M033/2021-03-02 15:34:41 Page 4/4 (cc) BY-NC-SA
Centrale Maths 2 MP 2021 -- Corrigé Ce corrigé est proposé par Sélim Cornet (professeur agrégé). Il a été relu par Bertrand Wiel (professeur en CPGE) et Gilbert Monna (professeur honoraire en CPGE). Ce sujet est constitué de deux problèmes indépendants ayant pour thème commun la démonstration d'inégalités de Bernstein. Il s'agit d'inégalités permettant de contrôler les valeurs maximales de la dérivée d'une fonction par les valeurs maximales de cette même fonction. · Le premier problème est plutôt original. Il propose la démonstration de telles inégalités pour des fonctions polynomiales et des fonctions polynômes trigonométriques. Après quelques questions préliminaires sur la famille des polynômes de Tchebychev, on démontre une première inégalité de Bernstein pour les fonctions polynômes trigonométriques : si f est une combinaison linéaire des fonctions de la famille (cos(k·), sin(k·))06k6n , alors Sup |f 0 | 6 n Sup |f | R R On en déduit une seconde inégalité pour les fonctions polynomiales : P Cn [X] Sup |P0 (x)| 6 n2 Sup x[ -1 ; 1 ] |P(x)| x[ -1 ; 1 ] · Le second problème est plus classique. Il se place dans le cadre des fonctions intégrables. Deux célèbres outils d'analyse dans des espaces de fonctions intégrables sont tout d'abord introduits : la transformation de Fourier et le produit de convolution définis pour f intégrable et g bornée sur R par Z Z + 1 + -i x b f () e d et f g : x 7- f : x 7- f (x - t)g(t) dt 2 - - La troisième partie est consacrée à la construction d'une fonction auxiliaire. Enfin, la quatrième partie conduit à la démonstration de l'inégalité proprement dite : il existe C > 0 telle que pour toute fonction f intégrable sur R, de classe C 1 et dont la transformée de Fourier est nulle en dehors de [ - ; ] on a Sup |f 0 | 6 C Sup |f | R R Si les thèmes du programme abordés dans ce sujet sont relativement peu nombreux, celui-ci constitue néanmoins un bon sujet d'entraînement, notamment pour qui souhaite pratiquer la trigonométrie ou le raisonnement par récurrence. Les deux problèmes suivent une progression typique d'un sujet de la banque d'épreuves CentraleSupélec : chacun commence par des questions classiques et proches du cours, puis la difficulté et la technicité des questions augmentent progressivement. Le sujet reste néanmoins abordable. Indications 1 Conjecturer le degré sur les premiers termes de la suite (Tn )nN , puis démontrer la conjecture par récurrence. 2 Procéder par récurrence. C'est également le moment de se souvenir des formules de trigonométrie ! 3 Décomposer P dans la base formée par les (Tk )06k6n . 4 Tout réel de l'intervalle [ -1 ; 1 ] peut s'écrire cos() pour un certain réel . 5 Procéder par récurrence pour démontrer l'inégalité donnée en indication dans l'énoncé. Utiliser cette inégalité pour majorer la norme de Tn 0 . Montrer enfin l'égalité en calculant un développement limité de Tn 0 (cos()) lorsque tend vers 0. 6 Former la décomposition en éléments simples de B/A. 8 Reconnaître un taux d'accroissement dans la définition de Q . 9 Vérifier que les k sont des racines distinctes de R. 10 Appliquer la formule (I.1) avec les polynômes R et Q pour obtenir la première relation. Évaluer ensuite en 1 pour en déduire la seconde relation. 11 Appliquer deux fois l'inégalité (I.2) : une première fois au polynôme X2n , puis réinjecter le résultat obtenu dans la formule (I.2) appliquée au polynôme P. 12 Décomposer f comme somme de fonctions trigonométriques, puis appliquer les formules d'Euler. 13 Penser d'abord à la technique de l'angle moitié. Appliquer ensuite la relation démontrée à la question 11 avec = e i . 14 Recourir une nouvelle fois à la question 11, appliquée au polynôme P = 1. 15 Procéder au changement de variable x = cos(). 16 Faire appel au résultat de la question 3 et à des formules de trigonométrie pour montrer que f Sn . Remarquer ensuite que Q(1) = f 0 (0). 17 Traiter séparément les cas t = 0 et t 6= 0. Dans ce dernier cas, un changement de variable pourra être utile. 18 Rassembler les résultats des questions 15 et 17. 19 Penser aux polynômes de Tchebychev. 20 Vérifier les hypothèses du théorème de continuité des intégrales à paramètre. 21 Penser au critère de continuité pour les applications linéaires entre espaces normés. 22 Procéder à un changement de variable. 23 Effectuer là encore un changement de variable. 25 Utiliser le théorème de dérivation des intégrales à paramètre. 27 Démontrer par récurrence le résultat donné en indication. Faire appel au théorème de prolongement C 1 pour prouver l'hérédité. 29 Étudier les variations de . 30 Commencer par construire une fonction : R R de classe C qui vérifie les inclusions ([ -1 ; 1 ]) ] - ; -1 ] et (R\ [ -2 ; 2 ]) [ 1 ; + [. 32 Procéder à une double intégration par parties. \ 33 Prouver que fb = f r . 34 Exprimer f 0 à l'aide des questions 25 et 33, et exploiter la question 24. Publié dans les Annales des Concours I. Inégalité polynomiale de Bernstein et applications 1 Remarquons que deg(T0 ) = 0, deg(T1 ) = 1 et deg(T2 ) = deg(2X2 - 1) = 2. On conjecture que, pour tout n N, le polynôme Tn est de degré n. Montrons donc par une récurrence à deux pas que la propriété P(n) : deg(Tn ) = n est vraie pour tout n N. · P(0) est vraie puisque deg(T0 ) = deg(1) = 0. · P(1) est vraie puisque deg(T1 ) = deg(X) = 1. · [P(n) P(n + 1)] = P(n + 2) : soit n N tel que P(n) et P(n + 1) soient vraies. Montrons que P(n + 2) est vraie. Pour cela, remarquons d'abord que Tn+2 = 2XTn+1 - Tn . Or, par hypothèse de récurrence, deg(2XTn+1 ) = deg(2X) + deg(Tn+1 ) = 1 + n + 1 = n + 2 et deg(Tn ) = n. Comme 2XTn+1 et Tn sont de degrés différents, il s'ensuit que deg(Tn+2 ) = max (deg(2XTn+1 ), deg(Tn )) = max (n + 2, n) = n + 2 Cela prouve que P(n + 2) est vraie. · Conclusion : par récurrence, la propriété P(n) est vraie pour tout n N. Ainsi, Pour tout n N, deg(Tn ) = n. La famille de polynômes (Tk )06k6n est échelonnée en degré, elle est par conséquent libre. Or, son cardinal est égal à n + 1, soit à la dimension de Cn [X], d'où La famille (Tk )06k6n forme une base de Cn [X]. 2 Montrons à nouveau par une récurrence à deux pas que la propriété P(n) : R Tn (cos()) = cos(n) est vraie pour tout n N. · P(0) est vraie puisque pour tout R, T0 (cos()) = 1 = cos(0). · P(1) est vraie puisque pour tout R, T1 (cos()) = cos(). · [P(n) P(n + 1)] = P(n + 2) : soit n N tel que P(n) et P(n + 1) soient vraies. Montrons que P(n + 2) est vraie. Soit R. Calculons, en utilisant la relation de récurrence sur les (Tn )nN et l'hypothèse de récurrence, Tn+2 (cos()) = 2 cos()Tn+1 (cos()) - Tn (cos()) = 2 cos() cos((n + 1)) - cos(n) Or cos((n + 1)) = cos(n + ) = cos(n) cos() - sin(n) sin() On en déduit Tn+2 (cos()) = 2 cos() (cos(n) cos() - sin(n) sin()) - cos(n) = cos(n)(2 cos()2 - 1) - 2 sin(n) cos() sin() puis, grâce aux formules de duplication et d'addition, Tn+2 (cos()) = cos(n) cos(2) - sin(n) sin(2) = cos(n + 2) = cos((n + 2)) ce qui prouve que P(n + 2) est vraie. · Conclusion : P(n) est vraie pour tout n N et finalement Pour tout n N, pour tout R, Tn (cos()) = cos(n). Publié dans les Annales des Concours 3 Soient n N et P Cn [X]. Comme (Tk )06k6n forme une base de Cn [X], il existe des nombres complexes a0 , . . . , an tels que P= n P ak Tk k=0 Il découle alors du résultat de la question 2 que, pour tout R, P(cos()) = n P ak cos(k) = a0 + k=0 k=0 Ainsi, n P ak Tk (cos()) = n P ak cos(k) k=1 La fonction 7 P(cos()) est dans Sn . Les fonctions de Sn sont appelées des polynômes trigonométriques. Elles constituent notamment la base de la théorie des séries de Fourier, qui consiste à approcher une fonction périodique et régulière par une suite de polynômes trigonométriques. 4 Soient n N et x [ -1 ; 1 ]. Soit = Arccos (x), ainsi x = cos(). Il s'ensuit |Tn (x)| = |Tn (cos())| = | cos(n)| 6 1 ce qui prouve kTn kL ([ -1 ; 1 ]) 6 1. En outre, remarquons que |Tn (1)| = |Tn (cos(0))| = | cos(n × 0)| = | cos(0)| = 1 Cela permet de conclure que kTn kL ([ -1 ; 1 ]) = 1 5 Suivons l'indication de l'énoncé et commençons par prouver, par récurrence, que la propriété P(n) : R | sin(n)| 6 n| sin()| est vraie pour tout n N. · P(0) est vraie : en effet, pour tout R, | sin(0 × )| = | sin(0)| = 0 6 0| sin()| · P(n) = P(n + 1) : soit n N tel que P(n) soit vraie. Montrons P(n + 1). Pour cela, considérons un réel quelconque et calculons | sin((n + 1))| = | sin(n) cos() + cos(n) sin()| Appliquons l'inégalité triangulaire : | sin((n + 1))| 6 | sin(n)| | cos()| + | cos(n)| | sin()| Les majorations | cos()| 6 1, | cos(n)| 6 1 et l'hypothèse de récurrence entraînent alors | sin((n + 1))| 6 n| sin()| + | sin()| = (n + 1)| sin()| · Conclusion : pour tout n N et pour tout R, | sin(n)| 6 n| sin()|