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Centrale Maths 1 MP 2017 -- Corrigé
Ce corrigé est proposé par Yvon Vignaud (professeur en CPGE) ; il a été relu par
Sélim Cornet (ENS Paris-Saclay) et Vincent Puyhaubert (professeur en CPGE).
Ce problème porte sur les matrices définies positives et sur les propriétés des
matrices dont la partie symétrique est définie positive. Les parties II et III
sont
indépendantes mais elles exploitent intensivement les résultats de la partie I
sur les
matrices symétriques positives.
La résolution de ce problème utilise de nombreuses parties du programme de
deuxième année : calcul matriciel par blocs, réduction des matrices,
automorphismes
orthogonaux des espaces euclidiens, exponentielles de matrices, systèmes
différentiels
linéaires, intégration de fonctions à valeurs vectorielles (matricielles en
l'occurrence).
· Dans la première partie, après quelques résultats classiques sur les matrices
symétriques et antisymétriques, on démontre dans la sous-partie I.B l'existence
et l'unicité de la racine carrée d'une matrice définie positive. À partir d'un
encadrement des valeurs propres réelles par les valeurs propres extrêmes de la
partie symétrique, on obtient ensuite une minoration du déterminant par le
déterminant de la partie symétrique lorsque celle-ci est définie positive. On y
établit enfin une caractérisation, parmi les matrices symétriques, de celles qui
sont les parties symétriques de matrices orthogonales.
· La deuxième partie introduit la notion de matrice F-singulière avec F un
sousespace vectoriel de Mn,1 (R) ; ce concept généralise la notion de matrice
non
inversible, qui correspond au cas particulier F = Mn,1 (R). Le résultat
principal est une caractérisation de la F-singularité reposant sur la non
inversibilité
d'une certaine matrice, construite par blocs à partir d'une base de F . Les
sousparties II.A et II.C se restreignent aux cas où la dimension de F vaut
respectivement n - 1 et n - 2, ces résultats étant ensuite étendus à toute
dimension
dans la sous-partie II.E ; les parties II.B et II.D traitent un exemple concret
pour illustrer les résultats respectifs de II.A. et II.C.
· La troisième partie étudie les matrices dites positivement stables,
c'est-à-dire
celles dont les valeurs propres ont des parties réelles strictement positives.
Dans
la sous-partie III.A, on montre que si deux matrices positivement stables
commutent alors leur somme reste positivement stable ; un contre-exemple dans
le cas non commutatif est explicitement demandé. Le résultat principal de la
sous-partie III.B est le fait que pour A positivement stable et t +, la norme
de exp(-tA) tend exponentiellement vite vers 0. Enfin, à l'aide de ce résultat,
on parvient dans la sous-partie III.C à montrer que si A est positivement stable
alors il existe une unique matrice B telle que AT B + BA = In et que cette
matrice B est nécessairement définie positive.
En conclusion, il s'agit d'un sujet long et plutôt difficile, compte tenu de la
maîtrise nécessaire d'une grande partie du programme. Les exemples et
contre-exemples
explicites étudiés permettent de mieux s'approprier les concepts algébriques
introduits par ce sujet ; en outre, sa résolution complète met bien en valeur
l'importance
des propriétés de symétrie et de positivité en mathématiques, et plus
particulièrement
ici dans un cadre matriciel.
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Indications
Partie I
I.A.2 Penser aux propriétés du projeté orthogonal sur un sous-espace vectoriel.
I.B.1 Appliquer le théorème spectral à la matrice As et procéder par double
implication.
I.B.2 Montrer que pour tout vecteur colonne X on a XT As X = XT AX et appliquer
ensuite cette identité à un vecteur propre X de A.
I.B.3.a Pour l'existence, considérer la matrice diagonale dont les coefficients
diagonaux sont les racines carrées des valeurs propres de As ; pour l'unicité,
montrer que toute matrice qui convient commute avec As et raisonner sur
les endomorphismes induits sur les sous-espaces propres de As .
I.B.3.b Considérer la matrice Q = B-1 Aa B-1 avec la matrice B fournie par la
question I.B.3.a.
I.B.3.c Montrer que -QT Q Sn+ (R) et en déduire que les valeurs propres de Q
sont imaginaires pures. Trigonaliser alors Q pour exprimer det(In + Q) sous
la forme d'un produit.
I.B.4 Vérifier que A A-1 s AT = As .
I.C.1 Appliquer l'inégalité de Cauchy-Schwarz à X et AX où X est un vecteur
propre de A et exploiter à nouveau l'égalité XT As X = XT AX vue à la
question I.B.2.
I.C.2 Rappeler les différentes formes des éléments de O2 (R) et calculer leurs
parties symétriques.
I.C.3.a Diagonaliser S et regrouper deux par deux ses valeurs propres distinctes
de 1 et -1 pour obtenir une écriture diagonale par blocs.
I.C.3.b Réduire la matrice orthogonale A dans une base orthonormée afin
d'obtenir
une matrice diagonale par blocs semblable à S.
Partie II
X
II.A.3 Appliquer la question II.A.2 et considérer le vecteur colonne Y =
.
-
Porter un soin particulier à justifier que les vecteurs utilisés dans la preuve
sont non nuls.
II.A.6 Appliquer une nouvelle fois l'identité vue à la question I.B.2 à un
élément
non nul du noyau de A-1 s .
II.A.7 Exploiter le résultat de la question I.B.4.
II.B.3 Calculer A-1 puis sa partie symétrique afin de trouver un vecteur du
noyau
de cette dernière.
II.C.4 Remarquer que NT A-1 N est une matrice de taille 2.
II.C.5 Pour le sens direct, considérer P = (A-1 )T P.
II.C.6 Exprimer YT AZ et ZT AY en fonction de YT As Z et YT Aa Z pour tous
vecteurs Y et Z.
II.C.7 Prendre la matrice B donnée par la question I.B.3 telle que B2 = As et
minorer l'expression de la question II.C.6 grâce à l'inégalité de CauchySchwarz.
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II.E.1 Il s'agit de définir une matrice N telle que la nullité du déterminant de
(N )T AN implique la F-singularité de A. Généraliser les idées des parties
II.A et II.C en utilisant une base de l'orthogonal de F.
II.E.4 Exprimer le déterminant en regroupant les valeurs propres complexes non
réelles par paires conjuguées.
II.E.5 Justifier qu'avec la matrice N définie à la question II.E.1, le résultat
de cette
question est en réalité une équivalence, puis utiliser tout ce qui précède.
Partie III
III.A.1 Distinguer deux cas suivant la nature des valeurs propres de A (réelles
ou
complexes non réelles conjuguées).
III.A.2.a Proposer un contre-exemple à l'aide de matrices triangulaires.
III.A.2.b Considérer l'endomorphisme induit par A sur E (A + B).
III.A.3.a Penser encore une fois à l'identité vue à la question I.B.2 afin
d'exploiter
la positivité de As .
III.B.1 Suivre l'indication afin d'exprimer u sous forme intégrale
Z t
u(t) = u(0)e -t +
e -(t-s) v(s) ds
0
III.B.2 À l'aide de la question III.B.1, montrer par récurrence forte
(descendante)
que les fonctions un , puis un-1 , . . . , u2 et u1 sont bornées.
III.C.1 Montrer que les endomorphismes M 7- MA et M 7- AT M sont positivement
stables.
III.C.2.b Calculer (BA)s pour minorer det(BA) à l'aide du résultat de la
question I.B.3. Regrouper les valeurs propres complexes conjuguées de A pour
montrer que det(A) > 0.
III.C.3.a Montrer que
M Mn (C)
T
(exp M) = exp(MT )
III.C.3.b Dériver C : t 7 AT W(t) + W(t)A + V(t).
III.C.3.c Choisir comme à la question III.B.3 et montrer que les coefficients
de la
matrice V(t) sont dominés par e -t lorsque t +. Pour montrer que
B Sn++ (R), montrer par exemple que XT BX > XT W(1)X.
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I. Résultats préliminaires
I.A.1 Le préambule du sujet rappelle que toute matrice A Mn (R) peut s'écrire
comme ceci : A = As + Aa où As est symétrique et Aa antisymétrique. On en déduit
que Mn (R) Sn (R) + An (R) et, l'inclusion réciproque étant immédiate,
Mn (R) = Sn (R) + An (R)
Pour montrer que ces sous-espaces sont supplémentaires orthogonaux, il suffit
désormais de montrer qu'ils sont orthogonaux. Soient S = (sij )16i,j6n Sn (R)
et
A = (aij )16i,j6n An (R). Calculons leur produit scalaire
n P
n
P
hS, Ai = Tr ST A =
sij aij
i=1j=1
Grâce aux relations sij = sji et aij = -aji valides pour tous 1 6 i, j 6 n,
l'interversion de la double somme donne
n
n P
n
n P
P
P
hS, Ai =
sij aij = -
sji aji = -hS, Ai
j=1i=1
j=1i=1
d'où hS, Ai = 0. Ainsi, les sous-espaces vectoriels Sn (R) et An (R) sont
orthogonaux et
Mn (R) = Sn (R) An (R)
Considérons maintenant la base canonique (Eij )16i,j6n de Mn (R) et remarquons
que la famille S = (Eij + Eji )16i6j6n est une base de Sn (R) de sorte que
dim Sn (R) = Card S =
n
P
j=1
j=
n(n + 1)
2
Comme An (R) est un supplémentaire de Sn (R) dans Mn (R),
dim An (R) = dim Mn (R) - dim Sn (R) = n2 -
dim Sn (R) = n(n + 1)/2 et
n(n + 1)
n(n - 1)
=
2
2
dim An (R) = n(n - 1)/2
La base canonique est une base orthonormée de Mn (R) pour le produit
scalaire h·, ·i. Par bilinéarité du produit scalaire, il en découle que la
famille
(Eij +Eji )16i6j6n est constituée de matrices non nulles deux à deux
orthogonales ; ceci prouve d'une autre façon la liberté de cette famille, qui
se trouve
donc être une base orthogonale (non orthonormée) de Sn (R).
La diagonalisation de l'endomorphisme de transposition T : A 7 AT
fournit un autre point de vue sur les résultats de la question I.A.1.
L'application T est une symétrie vectorielle de Mn (R) puisque c'est une
application linéaire de Mn (R) dans lui-même qui vérifie T T = id . En effet,
A Mn (R)
(T T ) (A) = (AT )T = A
En tant que symétrie vectorielle, T est diagonalisable et ses espaces propres
Sn (R) = Ker (T - id ) = E1 (T )
et An (R) = Ker (T + id ) = E-1 (T )
sont supplémentaires dans Mn (R). De plus, en notant A = (aij )16i,j6n et
B = (bij )16i,j6n deux matrices arbitraires,
P
P
hT (A), Bi =
aij bij =
bij aij = hA, T (B)i
16i,j6n
16i,j6n